Arsenal - Chelsea : L'analyse tactique
Malgré un dernier rush convaincant en Premier League, Arsenal avait vu la 4ème place définitivement s'éloigner la semaine dernière, au profit de Liverpool.
Cette finale de FA Cup représentait donc le dernier espoir de titre pour panser une saison ratée pour les joueurs d'Arsène Wenger, vivement critiqué ces dernières semaines, aussi bien chez les Gooners que dans la plupart des médias.
Seulement, les Londoniens du nord rencontraient leurs voisins de l'ouest, champions du Royaume, surfant sur une dynamique d'invaincus et avec un effectif au complet, à l'inverse des rouges et blancs.
Privés de Koscielny (suspension), de Gabriel, Gibbs, Mustafi (et Cazorla) (blessés), les Gunners partaient en effet avec une défense recomposée par le retour de leur capitaine Mertesacker (1er match de la saison) mais toujours avec le prometteur Rob Holding.
Ce match était également l'occasion de départager les managers, couronnés d'une victoire chacun en championnat sur leur adversaire du jour. Duel de 3-4-2-1, avantage dès lors à Antonio Conte.
Les XI de base
Le match
Le match ne met pas plus que quelques secondes pour dévoiler les intentions de part et d'autre dans la récupération du ballon : les deux équipes adoptent un pressing haut et agressif envers le porteur du ballon.
Seulement, un pressing va s'avérer bien plus efficace que l'autre, et ce n'est étonnamment pas dans les rangs de Conte que les signes de qualité apparaissent.
En effet, Chelsea va choisir d'aller chercher le responsable de la 1ère relance (Xhaka) très haut mais le duo Kanté-Matic va dès lors laisser beaucoup d'espace dans son dos, non comblé par la ligne défensive qui joue bien plus bas.
L'occasion pour Özil, Sanchez ou Ramsey de recevoir dans ces intervalles et de se retourner pour aller fixer la ligne défensive des Blues.
Pressing gagnant pour Arsenal
Cette situation va permettre aux Gunners de mettre à mal l'organisation des Blues et de créer du danger lors des premières minutes.
Le 1er but va d'ailleurs tomber sur ces premières intentions : reconversion défensive par le pressing, recherche de l'espace dans le dos de la 1ère ligne à effacer.
Le 1-0
Encore des soucis pour les Blues
Les joueurs de Conte vont ensuite pouvoir réagir par l'intermédiaire d'une reconversion rapide menée par Pedro.
Monreal défendant intelligemment face à la vivacité de son compatriote ; faute tactique qui va permettre au bloc d'Arsenal de se replacer.
Cette action sera symptomatique de la 1ère mi-temps des champions d'Angleterre.
Les catalyseurs Pedro et Hazard seront les seuls à pouvoir se montrer dangereux comme nous le verrons plus loin, et encore : à condition de pouvoir se mettre face au jeu, chose rare dans cette période.
En effet, Chelsea ne parvient pas à sortir du pressing d'Arsenal : les relanceurs que sont Courtois ou sa ligne défensive doivent allonger le jeu mais Costa ne gagne pas de duel face à Mertesacker et pire, tous les deuxièmes ballons sont pour les coéquipiers d'Ospina.
Même situation si le gardien colombien doit jouer long : les seconds ballons sont pour les Gunners.
Arsenal impose de l'individuel ; chaque joueur à un adversaire direct à presser.
David Luiz est obligé de passer négativement pour Courtois.
Ici la "combinaison" des 2 problèmes majeurs pour les Blues : les pertes de balle sur ces situations et un pressing haut inefficace.
Quelle que soit l'équipe qui doit jouer long : Arsenal remporte les seconds ballons par un meilleur positionnement près de la retombée.
Même si ces situations peuvent paraitre anodines, elles sont pourtant décisionnaires de quelle équipe pourra créer le jeu et imposer son rythme.
Or il s'agit bien d'Arsenal qui profite de cette dynamique pour se montrer plus dangereux, se créant plusieurs situations chaudes par l'intermédiaire de Sanchez ou Welbeck.
Ces problèmes arrivent d'autant plus avec l'énorme écart entre les lignes côté Chelsea en plus de Kanté et surtout (voir ci dessus) Matic qui peinent à se retourner rapidement.
Là où Hazard devrait resserrer sa position pour être proche de la retombée, Xhaka est complètement seul pour intercepter et Ramsey est également à l'affut.
De l'autre côté, les Gunners rétrécissent l'espace de retombée et Matic est en retard sur Ramsey.
La ligne défensive est très étirée par rapport à la ligne d'Hazard (milieu), ce qui offre davantage d'espace à Özil en l’occurrence.
1. Chamberlain dispose d'énormément d'espace le temps que la passe lui parvienne.
2. Moses, en retard, ne peut contrer la passe en 1 touche de l'Anglais qui isole Ramsey dans le dos de Matic-Kanté.
A noter que les fois où Moses ou Alonso seront alignés avec la défense, ils laisseront Chamberlain/Özil distribuer des ballons dangereux dans le dos de l'arrière garde des Blues.
Il y a d'ailleurs lieu de remarquer de l'incompréhension dans l'attitude des joueurs de Conte : celui-ci demande clairement d'intensifier le pressing mais Arsenal s'en sort toujours et les coéquipiers de Courtois semblent perdus.
Les Gunners, eux, privilégient la recherche le basculement côté faible lors de situations plus difficiles :
Et les joueurs de Wenger alors, comment se comportent-ils une fois que les quelques rares seconds ballons ne sont pas remportés?
David Luiz va trouver Pedro entre les lignes... Mais qui sont bien plus compactes que celles de Chelsea ; l'Espagnol bénéficie de moins d'espace pour s'exprimer et va voir Xhaka se retourner sur lui.
Les 2 lignes d'Arsenal réagissent très vite en cas d'espace trouvé par Chelsea.
Elles peuvent en plus compter sur un très bon travail défensif des 3 joueurs offensifs, ici Sanchez.
Arsenal opte donc pour un bloc bas et une formation rapide des 2 lignes (5-4-1)... Pas toujours bien exécutée.
En effet, là ou Özil, Sanchez et Ramsey bénéficient de beaucoup d'espace dans les interlignes, Monreal et Holding suivent de près les décrochages de Pedro et Hazard. Mais ceux-ci vont parvenir à se mettre face au jeu...
Heureusement pour eux et malheureusement pour Conte qui voit ses troupes ne pas concrétiser ces quelques munitions :
Eden Hazard est suivi dans son décrochage par Holding et n'ose pas se retourner face au jeu.
Cette fois personne ne sort sur Hazard qui a toute la liberté de perforer la défense et d'offrir une occasion franche à Pedro.
Ici c'est Pedro qui parvient à se défaire de Monreal et de créer le danger derrière.
La 2ème mi-temps
De retour de la pause, Conte avait réglé le souci de la retombée des seconds ballons : Chelsea en récupère bien plus qu'en 1ère période et les Blues s'installent petit à petit dans le camp de leurs voisins du nord de Londres - Pedro et Hazard en profitent également pour accélérer le jeu.
Le problème majeur de l'espace interligne entre la défense et le milieu est solutionné aussi, empêchant l'adversaire de progresser dans le dos du duo Matic-Kanté... du moins quand le ballon n'est pas sur une des ailes.
Les deux lignes de Chelsea sont bien plus compactes et obligent Sanchez, Özil et Ramsey de jouer plus bas... Le temps d'un instant.
Le temps d'un instant car il ne faut pas longtemps pour que le pressing montre à nouveau ses carences, avec néanmoins pas autant de conséquences qu'en 1ère période, les Gunners n'en profitant pas.
Derrière ça, Chelsea doit faire face à la même disposition en face : un bloc bas et peu d'espace pour s'exprimer sauf sur les reconversions offensives rapidement menées par Hazard en particulier.
Arsenal va pouvoir sortir de situations de pressing dans son camp par l'intermédiaire de Welbeck (conservation, récupération, dribbles) mais voit donc Chelsea gagner une supériorité territoriale.
Comme conséquence : Azpilicueta va tenter d'apporter la supériorité numérique sur le flanc droit et Kanté tente de se positionner dans les intervalles... Infructueux.
Comme en 1ère période, la défense d'Arsenal joue très bas de façon à augmenter l'espace de jeu effectif et sortir des situations de pression.
Azpilicueta apporte son traditionnel soutien sur son côté.
Kanté, lui, est beaucoup trop proche de Sanchez/Welbeck que pour recevoir : son positionnement offensif pose problème.
Même situation avec Pedro, mal positionné dans l'intervalle.
Les quelques reconversions offensives des Blues ne trouvent que des situations complexes de 3 >< 5 pour leur trio offensif, et cette domination globale de Chelsea va offrir de bien meilleures supériorités numériques à leurs opposants de part la position haute de leur bloc.
A côté de ça, Aaron Ramsey continue son travail de sape pour étirer ce même bloc de par ses courses.
Cependant, l'activité du Gallois va manquer de couter l'égalisation à son équipe ; son repositionnement se faisant évidemment plus complexe :
Au final, l'égalisation arrivera un peu plus tard sur une récupération du ballon de David Luiz dans les pieds d'Özil qui choisit pour une fois de ne pas sortir du press via Xhaka en soutien.
Là où les supporters des Blues craignaient pour leur équipe suite à l'expulsion de Moses quelques minutes plus tôt, l'égalité numérique dans le rectangle profite à Diego Costa pour se jouer d'Holding.
Le 1-1
Le 2-1
C'est quelques secondes après la mise en jeu qui suit le but que Giroud, fraichement rentré, va chercher le dos de Cahill par un appel et redresse son centre à 45°.
Le volume de jeu de Ramsey vient conclure l'action pendant que Kanté a lâché le marquage du n°8 d'Arsenal.
L'ultime seconde ballon pendant qu'Arsenal gaspille
Alors que Chelsea est repassé en 4-4-1 depuis l'exclusion de son Nigérian, les hommes de Conte tentent dès lors d'apporter un maximum de présence aux abords des 30 mètres adverses.
Les hommes de Wenger vont pouvoir s'adonner aux joies de la contre-attaque mais vont mal gérer ces situations.
Là où les protégés de Conte n'étaient pas présents à la retombée du ballon, le message est clairement passé lorsque Diego Costa a de nouveau le ballon de l'égalisation suite à une situation du genre dans le rectangle.
Le naturalisé espagnol ne fera pas mouche et Özil aura le (avant-)dernier ballon de match au bout des pieds, perdu par le manque de lucidité global dans cette fin de match conclue par la victoire d'Arsenal.
Conclusion
Là où le spectateur neutre attendait certainement une supériorité tactique des troupes d'Antonio Conte sur ce match, c'est bien Arsène Wenger qui sortir vainqueur dans ce duel de 3-4-2-1.
Les multiples tentatives de pressing haut furent un échec et le bloc défensif de Chelsea a laissé bien trop d'espace à des joueurs qui en raffolent habituellement.
La supériorité numérique apportée dans l'axe central du terrain par les décrochages (non suivis) de Sanchez et d'Özil ont mis en grande difficulté Kanté et surtout Matic qui eut bien du mal à gérer l'espace qu'il dû couvrir entre pressing sur Xhaka et retour défensif.
En face, Pedro et Hazard n'eurent pas beaucoup de situations de danger face au rectangle adverse et ne parvinrent pas à faire la différence une fois les espaces trouvés ou leur duel remporté.
Là où Chelsea a pu compter sur un très bon Courtois pour annihiler les nombreuses attaques rapides d'Arsenal, un manque de justesse dans le dernier geste couplé à un Ramsey hyperactif firent pencher la balance du côté des pensionnaires de l'Emirates Stadium.